Misery, de Stephen King

Chaque année est un prétexte pour sortir un livre de Stephen King de ma gigantesque Pile à Lire. J’ai beaucoup de ses titres qui trônent fièrement dans ma bibliothèque, surtout les grands classiques. Mais, bizarrement, il n’y a pas si longtemps que cela que je me suis mise à les lire !

Cette année, j’ai arrêté mon choix sur « Misery », qui est un classique parmi les classiques, et que je connais bien, puisque j’ai vu et revu le film, que j’ai d’ailleurs à chaque visionnage trouvé magistral ! Tout le monde, ou presque, connaît l’histoire de ce pauvre écrivain qui a un accident de voiture et qui est « sauvé » (si l’on peut dire !) par Annie Wilkes, qui est sa « plus grande fan » et qui est également (quelle chance !) infirmière ! Paul, cet écrivain miraculeusement sauvé d’une mort certaine, est l’auteur d’une série de romans à succès : la série « Misery ». Annie aime tellement cette saga ! Mais Paul a depuis longtemps envie d’autres choses, et il a donc choisi de tuer son héroïne dans son dernier roman. En tant qu’auteur, il se sentait prêt à écrire ce dont il a envie, et plus ce qu’il faut écrire pour que son public soit content.

Sauf qu’Annie Wilkes ne va vraiment pas apprécier que son héroïne littéraire préférée meure, et elle exigera donc de Paul qu’il se mette à écrire un nouvel opus qui va la ressusciter ! Et de manière crédible, si possible ! Chose dont elle s’assure tout simplement en séquestrant le pauvre Paul qui, blessé, n’est de toute façon pas capable de courir bien loin !

Annie est totalement barge. Paul est franchement égocentrique. Mais Annie est surtout retorse, et Paul, terrifié.

Oui, on peut trouver le film exceptionnel ! Si et seulement si on n’a pas lu le livre dont il est tiré ! Parce que ce livre est vraiment phénoménal et qu’on se rend rapidement compte que le film n’a pas pu rendre un hommage suffisamment digne à ce qui fait l’une des signatures du King : sa manière de décomposer le processus de la création littéraire ! Il en découle forcément le regard que lui-même porte sur l’écrivain, sur le monde de l’édition. Et sur l’homme caché derrière l’écrivain également ! Et là, le King est tout simplement fascinant !

Dans le début du livre, il y a quelques instants exceptionnellement angoissants, qui établissent un vrai climat anxiogène pour le lecteur. Là, j’ai cru que je ne pourrais pas aller plus loin. L’épouvante, ça n’a jamais été mon truc. Mais le King y a ajouté sa touche personnelle, et bien sûr, la magie a opéré.

Annie Wilkes est un personnage hors du commun. Elle est clairement tarée, elle a des réactions parfois complètement stupides et des « biscornouilles » de remarques qui pourraient prêter à sourire. Sauf qu’elle est singulièrement dangereuse et flippante ! Paul, au départ, écrit pour survivre. Il va finalement survivre pour écrire… même si cela lui en coûtera ! Car rien ne lui est épargné ! Pour le coup, le film ne m’avait pas du tout préparée à ce que j’allais découvrir dans ces lignes ! 

La position des lecteurs est également au cœur du récit, décryptée avec beaucoup d’intelligence ! Lequel d’entre nous n’a jamais eu peur ou n’a jamais eu de peine pour ces héros faits de papier ? De papier !!!! Qui n’existent réellement que dans l’imagination d’un auteur, mais qui prennent pourtant vie pour chaque lecteur, avec qui celui-ci développe une vraie relation ! Alors si, en blaguant, nous sommes presque tous capables de menacer un auteur du pire s’il venait à tuer notre héros préféré (Franck Thilliez a sûrement déjà été assuré de représailles si l’envie lui prenait de liquider Sharko), nous concluons normalement la menace d’un éclat de rire sans danger ! Le King, lui, a concrétisé ce chantage avec brio au travers un récit glaçant et diablement addictif. Le King n’est pas King pour rien…